Steve Dalachinsky & Joëlle Léandre - The bill has been paid

STEVE DALACHINSKY & JOËLLE LEANDRE - The bill has been paid (Dark Tree, 2013)
Difficile de tenir un blog soi-disant sur les musiques improvisées sans parler de Joëlle Léandre au moins une fois. Ça sera chose faite donc. La plupart des lecteurs la connaissent déjà certainement, c'est certainement la contrebassiste la plus prisée dans les salles et les festivals français de "jazz et musique improvisée". Une musicienne incontournable, qui est bien évidemment techniquement irréprochable, il s'agit d'une très grande virtuose, qui parvient à toujours interagir avec spontanéité, justesse et puissance. Une très grande musicienne d'improvisation libre me direz-vous, seulement voilà, elle fait aussi partie de ces gens qui ne remettent pas forcément en question les formes de la musique, et véhiculent - parfois sans le vouloir, de nombreux clichés. Et The bill has been paid ne déroge pas à cette règle. La présence d'un poète pourrait laisser croire l'inverse, mais non, puisqu'il s'agit de Steve Dalachinsky, un proche de Matthew Shipp et de William Parker forcément...

Bon maintenant, j'arrête mon coup de gueule. Parce que voilà, on a Joëlle Léandre à la contrebasse, Steve Dalachinsky au texte et à la voix, et je trouve ça quand même plutôt bien. Il s'agit d'une musique belle, singulière et qui paraît même intime grâce aux spoken-words de Dalachinsky. C'est intense, l'écoute entre la contrebassiste et le poète est sensible. Seuls les interludes où Léandre propose des soli ont tendance à m'ennuyer. Mais le reste est quand même surprenant - et prenant. Une voix incisive et des textes bruts, soit des éléments parfaits pour dialoguer avec le jeu hyper réactif de Léandre. Donc autant dire que ça marche très bien.

Mais quand même. Je ne comprends pas l'admiration que cette contrebassiste suscite. OK, elle joue très bien ce qu'elle joue, c'est une très grande contrebassiste pleine de talent, aucun doute, mais d'ici à dire que c'est une grande musicienne, il y a encore un pas. Et ce pas ne me paraît pas franchi, j'ai juste l'impression d'entendre quelque chose mille fois rabattu, c'est peut-être très bien rabattu ici, mais déjà fait trop de fois (et ses émules n'arrêtent pas...). Heureusement, la voix de Dalachinsky permet de quitter un peu les sentiers de la musique improvisée, mais on reste encore en plein dans les clichés de l'improvisation libre, réactive et pseudo-décomplexée.

Ecoutez-le si vous voulez vous la jouer à une dégustation de Bourgogne avec des lecteurs de jazzman, ou si vous êtes vraiment fans de Léandre ou de musique improvisée réactive, sinon...